lundi 30 juin 2014

Evaluation des élèves : généralisation des usines à cases

N'y avait-il rien de plus urgent à s'occuper que de vouloir changer l'évaluation des élèves ? Notre nouveau ministre, pourtant attendu sur d'autres fronts, vient de lancer une « conférencenationale sur l'évaluation des élèves » qui est censée en finir avec « l'arbitraire » de la note chiffrée. Il a découvert brusquement la semaine dernière que « le système d'évaluation des élèves, tel qu'il existe à l'heure actuelle, contribue fortement à accroître les inégalités scolaires ». Diable ! Si les inégalités scolaires augmentent, ce n'est pas à cause des notes chiffrées mais du renoncement à des programmes scolaires exigeants. La réduction des inégalités culturelles ne peut se faire qu'avec plus de culture ! Les élèves seraient traumatisés et découragés par les mauvaises notes ? J'en connais beaucoup à qui elles font souvent rire, surtout lorsque les résultats dans ma discipline n'interviendront pas dans leur orientation. Une note, bonne ou mauvaise, n'est que l'appréciation la plus concise possible d'une production, non d'une personne, et ce n'est en aucun cas un « outil de relégation » comme l'écrit le ministre. La mauvaise note ne fait que traduire un travail insuffisant qui n'a pas répondu aux objectifs fixés. Loin de traumatiser, elle n'est là que pour alerter celui qui la reçoit de revoir sa copie, au sens propre , même si cette révision est loin d'être faite par les élèves. Dans son avant propos, le ministre trouve que les élèves « apprennent très jeunes, trop jeunes, le sens des mots compétition, performance et trop souvent échec ». Il y a bien longtemps que ces mots ont été bannis du vocabulaire de l'école française alors qu'à l'inverse, ils devenaient de plus en plus présents dans tout le reste de la société et dans bon nombre de systèmes scolaires étrangers ! A ce propos, il est cocasse de constater que la direction du comité d'organisation de cette conférence sur l'évaluation a été confiée à trois personnalités issues des formations sélectives de l'école française ou qui y enseignent !
Il n'est pas besoin de lire entre les lignes pour deviner l'objectif de cette réforme : une évaluation par compétence à toutes les sauces qui nécessitera de la part des professeurs le remplissage fastidieux et chronophage de grilles et de cases parfaitement incompréhensibles des élèves et leurs familles. Cela n'ira sûrement pas dans le sens que souhaite le ministre qui dénonce des évaluations actuelles « subies par les élèves dont ils ne saisissent pas les codes ni les attendus implicites, contrairement aux élèves les mieux pourvus culturellement, qui acquièrent ceux-ci en dehors de l'Ecole ». Si les notes chiffrées ont un mérite, c'est bien celui d'être compréhensibles par tous. 

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