vendredi 17 septembre 2021

J.M. Blanquer a-t-il échoué ?

 

C'est la question posée en gros titre de couverture de l'hebdomadaire Marianne de la semaine passée (3 au 9/09 n°1277). Si l'on s'en tient aux réformes engagées depuis sa prise de fonction, la réponse est plutôt non ! Le succès est quasi total sur ce plan. Le ministre a profité, comme ses derniers prédécesseurs, de l'inefficacité des protestations et la résignation des personnels de l'éducation, professeurs en premier. Mais, comme le souligne l'article, le ministre a plus qu'épuisé l'a-priori favorable qui était le sien à sa prise de fonction. Mais sur ce plan, la route était grande ouverte pour lui. L'école française étant tombée bien bas suite aux politiques menées depuis 30 ans (et auxquelles il n'est pas étranger lorsqu'il fut directeur de la Degesco pendant la mandature Sarkozy). Tout propos sur un retour des exigences à l'Ecole ne pouvait que flatter favorablement tout ceux qui mesurent avec consternation la chute depuis 30 ans.

Passons sur les ordres et contre ordres qui ont accompagné la gestion de la crise sanitaire ainsi que les lénifiants et convenus « remerciements » qu'il nous a adressé à maintes reprises. La réforme du lycée et du bac restent la pierre d'achoppement de son action. Il faut y inclure aussi ceux qui au ministère l'ont élaboré dans les détails. Mais ces derniers ne seront pas soumis, hélas, aux échéances électorales prochaines. Loin de simplifier et de « re-muscler » comme il l'avait promit, J.M. Blanquer l'a transformé en usine à gaz et à cases dans lequel les élèves et les professeurs ont bien du mal à s'y retrouver. Entre les épreuves communes (annulées depuis l'an dernier), les épreuves anticipées, l'introduction du contrôle continu (dont le coefficient a changé entre temps) et le « grand oral », le panorama du nouveau bac ressemble à un œuvre picturale post-moderniste difficilement déchiffrable (*). Que de complications pour un examen final dont la valeur a diminué proportionnellement au nombre de récipiendaires (je n'ose pas écrire lauréats!) a augmenté et surtout, qui ne donne aucune assurance de réussite dans l'enseignement supérieur. Quant aux résultats, la situation sanitaire n'a pas obéré les pourcentages mirobolants de « réussite » (93% pour 2021 contre 95 en 2020).

La suppression des séries du bac général, conçue pour en finir avec le déséquilibre des dites séries, a produit une dispersion des groupes classes, cauchemar dans l'élaboration des emplois du temps. Elle est déjà entamée avec une baisse de la demande de ces spécialités en première de 3,4% et 2% respectivement pour cette rentrée (**). La baisse s'accentue davantage pour les mathématiques lors du passage en terminale avec l'abandon d'une des 3 spécialités de première (20% d'abandon pour les mathématiques et 7% pour les sciences physiques). Les spécialités Sciences économiques et sociales et Histoire-géographie géopolitique sciences politiques sont en hausse respectivement de 5,7% et 3,6%. Nous voyons donc disparaître de nos classes de spécialité scientifique (sans regrets pour ma part!) les élèves les moins motivés par les sciences qui venaient auparavant remplir sans conviction l'ancienne série S vue comme un passage obligé. Localement, cette disparition est plus sévère que les pourcentages précédents. Dans mon lycée, nous avons perdu cette rentrée l'équivalent d'une classe en spécialité (sciences physiques et mathématiques) et une autre subira le même sort l'an prochain. Une solution pour le ministère à la difficulté de recruter des professeurs de mathématiques...

(*) https://eduscol.education.fr/725/presentation-du-baccalaureat-general

(**) https://www.education.gouv.fr/choix-des-enseignements-de-specialite-en-premiere-et-terminale-generale-les-lyceens-diversifient-et-306401


lundi 6 septembre 2021

Rentrée 2021

 

Cela fait presque 2 ans que je n'ai rien publié sur ce blog. Il a été difficile de suivre l'actualité tant elle fut dense dans l'intervalle et le travail en classe et hors la classe a demandé un investissement lourd avec la réforme du lycée. Il a fallut pour tous les professeurs préparer les programmes de seconde et de première simultanément, chose jamais vue auparavant. Pour ma part, j'ai dû commencer la rédaction de mes cours dès parution des programmes en janvier 2019 et poursuivre tout l'été pour application en septembre de la même année. Puis est arrivé le premier confinement en mars 2020... Que j'ai fort bien accueilli, comme un certain nombre de collègues de mon lycée. Un certain nombre d'élèves de deux de mes classes étaient devenus assez insupportables et ce fut une libération de ne plus les avoir en face physiquement. Le travail avec mes classes est passé exclusivement par l'espace numérique de travail de l'établissement et sa messagerie intégrée. Je n'ai pas fait de visioconférence, parfaitement inégalitaire pour les élèves et source de contraintes pour leurs familles. Les décrocheurs furent plus nombreux que ceux annoncés par le ministère. J'ai compté dans une classe de première technologique de 15 élèves et pour ma discipline (coefficient 16 au bac), 14 décrocheurs n'ayant pas donné signe d'existence pendant toute la période. Cela ne les a pas empêché de tous passer en terminale. Mais que faire d'eux autrement ?

Cette rentrée 2021 se fait donc à effectif complet. Dommage ! On avait finit par s'habituer et apprécier les demi-effectifs dans nos salles ventilées par courants d'air. Il va nous falloir gérer des classes chargées (en nombre et en lacunes) et parler plus fort derrière nos masques pour être audible dans toute la salle à l'acoustique déplorable, tout en tentant de respecter un protocole sanitaire aussi inapplicable que les précédents. Ceci pour un pouvoir d'achat en baisse depuis plus de 30 ans comme le montre le dossier de l'hebdomadaire Marianne dans son édition de la semaine dernière (n° 1276 du 27/08 au 2/09). On y apprend qu'un professeur agrégé a perdu 288 euros mensuels entre 1982 et aujourd'hui. Plus éloquent encore, il fallait à ce même professeur 7 années et demi pour acquérir un appartement à Paris en 1982 contre 39 années aujourd'hui ! Comme si une peine ne suffisait pas, voici qu'un report de l'âge du départ en retraite se profile à l'horizon proche. J'ai été stupéfait d'apprendre qu'il s'appliquerait à partir des générations nées dans les années 1960 alors que la réforme par points engagée par le gouvernement l'an dernier, puis suspendue (annulée?) pour raison de pandémie (on se demande pourquoi!), ne s'appliquait qu'aux générations nées après 1975. C'est formidablement rageant pour ceux qui comme moi se trouvent en fin de carrière de se voir imposer à la dernière minute une ou deux années de plus au travail alors qu'on commençait à en voir la fin ! Prédiction auto-réalisatrice : le prochain gouvernement reprendra certainement cette mesure, surtout si c'est le même ! Peut-on espérer qu'il se penche sur des aménagements de fin carrière ? Car c'est bien là où le bât blesse. Rien n'est fait aujourd'hui dans ce cadre dans la fonction publique. Hormis un changement de métier, difficilement envisageable passé 50 ans, je ne vois que le travail à temps partiel pour ceux qui peuvent se le permettre financièrement.

Bonne rentrée et bon courage à tous !


PS : Article rédigé par le truchement d'un écran plat non acquis avec une allocation quelconque !