dimanche 7 février 2016

Le nénuphar tombé du phare

La réforme du collège ne suffisant pas à abaisser encore plus le peu qui est encore enseigné à l'école française, voici que le ministère, sans doute dans le but de faire diversion, annonce une réforme de l'orthographe ! En fait, on apprend qu'il s'agit d'appliquer celle élaborée par l'Académie française en 1990 et dont tout le monde avait oublié l'existence et plus encore oublié de l'appliquer. Mais voilà que le ministère de l'éducation donne maintenant consigne de l'appliquer dès la rentrée 2016 à commencer par les manuels scolaires qui devront mentionner la nouvelle orthographe de certains mots. De soit-disant (oups ! J'ai oublié d'enlever le trait d'union comme l'exige la réforme!) simplifications qui cachent de nouvelles règles et exceptions. Ainsi, l'accent circonflexe sur le i et le u est censé disparaître (re-oups!) sauf dans certains mots pour ne pas les confondre avec d'autres, comme mûr et sûr par exemple. Mais exception à l'exception, mûr finit par perdre son accent au pluriel : un fruit mûr mais des pommes mures ! On pourrait multiplier les exemples puisque ce ne sont pas moins de 2400 mots qui passent ainsi à la moulinette (encore deux t ?). Le summum est atteint quand même avec nénuphar dont on pourra remplacer les lettres p et h par f. Mais pourquoi s'arrêter en si bon chemin ? Autant faire la substitution dans phare et pharmacie tant que nous y sommes. Après tout, l'officine de médicaments ne s'écrit-elle pas farmacia en espagnol ? Voilà qui marquerait un rapprochement dans l'orthographe des langues latines. Ajoutons aussi le pH en chimie avec lequel nous torturons les élèves à écrire petit p et grand H. Plus de problème avec la seule lettre f ! La notion en perd totalement sa signification mais que n'est on pas prêt à faire pour ne plus ennuyer nos élèves avec des règles rétrogrades et d'un autre temps !
Hélas, ce n'est pas sur ces quelques particularités que l'orthographe des élèves pêche (pèche, peche?) le plus mais bien sur les accords et autres conjugaisons. La confusion entre l'indicatif et le participe passé des verbes du premier groupe est à son comble dans les copies qui passent sous les yeux. J'avoue que de guerre lasse, je ne les corrige même plus. Je laisse le soin au marché du travail de trier le bon grain de l'ivraie parmi les futurs candidats à l'emploi que constituent nos élèves, si toutefois l'orthographe représente encore une qualité appréciée des recruteurs. Lorsque l'orthographe fantaisiste sera majoritaire dans les écrits, elle finira forcément par représenter la norme ! Les personnes de moins en moins nombreuses écrivant correctement ne formeront plus qu'un réduit d'irréductibles gaulois...