mardi 28 avril 2015

Volapük pédagogiste

Dès l'annonce du projet de réforme du collège, il semblait d'après mes lectures que les articles à ce sujet se partageaient à peu près équitablement entre partisans et adversaires. Du moins sur le net, car les reportages des journaux télévisés, surtout ceux de France 2, présentaient la réforme sous un jour des plus favorables. J'ai l'impression que ces derniers jours, ce rapport de force s'inverse, en faveur du rejet, comme en témoigne cet excellent article du site Slate.fr. Des personnalités politiques ou intellectuelles (en excluant chez ces dernières les spécialistes des « sciences de l'éducation », inspirateurs de toujours du contenu de ces réformes) prennent de plus en plus position contre ce projet. Dernier à ce jour de cette liste qui s'allonge de plus en plus, Régis Debray, invité de la matinale de France culture, qui a dit tout le mal qu'il pensait de cette réforme, notamment sur le renvoi des langues et civilisations anciennes au rang d'insipide « enseignement pratique interdisciplinaire » ou le caractère optionnel de l'étude des Lumières dans le projet des programmes d'histoire. Régis Debray n'a pas manqué d'humour en rappelant quelques expressions savoureuses du jargon pédagogiste : un crayon se dit « outil scriptural », les parents d'élèves sont les « géniteurs d'apprenants » et nager en piscine devient se déplacer dans un « milieu aqueux standardisé ». Encore plus ridicule que le célèbre « référentiel bondissant » (comprenez : un ballon) qui fit flores ces dernières années comme exemple type du volapük pédagogiste. Voilà au moins quelque chose qui ne se réforme pas dans l'éducation nationale ! Rien de nouveau sous le Soleil, hélas. A propos, les utilisateurs de ce langage savent-ils qu'ils peuvent remplacer le mot Soleil par « plasma auto-gravitant » ?

lundi 20 avril 2015

Vieux tracts pédagogistes des années 1970

Je n'ai pas écouté l'émission télévisée d'hier dont le président de la République était l'invité mais les média en ont donné heureusement un résumé exhaustif. On ne peut que se réjouir de l'aide financière apportée aux apprentis mineurs et aux exonérations de charges associées pour les entreprises. L'apprentissage doit se développer davantage en France et ce n'est pas par hasard que l'Allemagne, qui compte près de 50% d'apprentis parmi les jeunes (25% de plus qu'en France), affiche un taux de chômage des jeunes le plus faible d'Europe. L'actuel gouvernement avait pourtant envoyé il y a 2 ans un signal funeste pour l'apprentissage. On se souvient que l'ancien ministre Peillon avait annulé la possibilité d'apprentissage dès 14 ans votée par la précédente majorité. La mesure était justifiée par le peu de volume de recrutement dès cet âge : les chefs d'entreprise trouvaient que les jeunes candidats n'avaient pas assez de connaissances et de compétences. Un aveu flagrant d'échec du collège unique alors qu'il y a 40 ans, le niveau était apparemment suffisant pour devenir apprenti dès 14 ans. Cela ne va pas s'améliorer avec la réforme du collège engagée par le ministère ! Le président, apparemment grand connaisseur de tracts politiques des années 1970, a-t-il remarqué que l'idéologie qui préside à la réforme du collège engagée par son ministre de l'éducation est issue de théories constructivistes des mêmes années ? De vieilles idées, vraiment datées, qui ont fait la preuve de leur inefficacité depuis longtemps ! 
Nouvelle réjouissante ce soir, l'ancien premier ministre J.M. Ayrault, ancien professeur d'allemand, vient de rejoindre les adversaires de la réforme du collège. La suppression des classes bi-linguistes signerait la fin de l'apprentissage de la langue de Schiller au collège. Ces classes rassemblent en effet une large majorité des germanistes. Tout cela au nom d'un égalitarisme forcené qui prétend que ces classes sont « élitistes ». Encore des vieilleries des années 1970...

mercredi 8 avril 2015

Collège 2016 : Vieux gadgets pédagogiques sur fond de réduction horaire

Déjà 20 jours de grève quasi totale sur toutes les fréquences de Radio France. Le silence (véritablement radio!) commence à devenir pesant dès le lever et jusque dans la voiture. A moins de se connecter sur des stations commerciales où l'on s'agace vite à devoir supporter le ton plus que débile de la majorité de publicités. Deux semaines d'arrêt complet des émissions et on se prend à rêver d'un mouvement d'une telle durée dans l'éducation nationale. Assurément la ministre en perdrait son sourire médiatique inoxydable. Mais ne rêvons pas ! La profession est trop résignée devant ces « réformes » continuelles qui dégradent jour après jour nos conditions matérielles et morales de travail. Le projet de réorganisation (ou plutôt de désorganisation) du collège pour la rentrée 2016 mériterait pourtant à lui seul une bronca des professeurs, mais aussi des parents d'élèves. La majorité des syndicats encore lucides ont claqué récemment la porte des « négociations », sauf les indécrottables UNSA et SGEN-CFDT, officines des djihadistes du constructivisme pédagogique et partisans de la transformation des professeurs en animateurs socio-culturels. Pourtant, ces syndicats prompts à dénoncer l'organisation actuelle du collège comme étant un « mini-lycée élitiste », devraient remarquer que ce projet tend à copier encore plus l'actuel lycée général. Les « enseignements pratiques interdisciplinaires » (EPI) à tous les niveaux du collège (sauf la sixième) introduits par ce projet ne cachent pas leur parenté avec les travaux personnels encadrés (TPE) du lycée. Pas vraiment une innovation pédagogique ! Ces activités ont fait la preuve depuis longtemps de leur rendement fort médiocre, voire nul, au lycée. Paradoxalement, le document de présentation de ces « activités » précise qu'elles bénéficieront d'un volume horaire dédié alors qu'on ne le retrouve pas dans les grilles horaires par discipline de chaque niveau du collège. Voilà qui donne l'impression d'un travail pour le moins bâclé ! Quant aux thèmes de travail présentés (développement durable, Sciences et société, mondé économique et professionnel...), on peut douter qu'ils suscitent l'enthousiasme et l'adhésion des élèves devant des intitulés aussi abscons, notamment pour ceux issus de familles défavorisées. Loin de lutter contre les inégalités, comme le prétend le document ministériel, ce genre d'activité ne fait que les renforcer entre ceux qui n'ont que l'école pour acquérir des connaissances structurées et ceux qui disposeront d'aide chez eux. Pour éviter une perte de temps, les collègues soucieux d'apporter des connaissances solides devront proposer des activités dirigées en lien direct avec les programmes de leur discipline. La chose devrait être possible si ces EPI sont finalement pris sur les horaires disciplinaires, vu que la « réforme » se fera évidemment à moyens constants...