Le
versement hier de l'allocation de rentrée scolaire sous condition de
ressources s'accompagne invariablement dans les média de reportages
sur des mères de familles (*) au budget serré en train d'acheter
moult fournitures scolaires dans une grande surface. Avec, bien sûr,
le choix cornélien entre le cartable à bas prix et celui de
marque... Il serait plus éclairant pour le téléspectateur de
montrer les monceaux de stylos, gommes, copies, trousses, ciseaux et
même calculatrices que l'on récupère dans nos salles de classes à
chaque fin d'année, « oubliés » par nos élèves et pas
forcément par les plus aisés d'entre eux... A quoi bon en effet
être soucieux du matériel puisque c'est l'Etat qui le paye chaque
année ? Et puis tant d'argent versé pour quelques crayons qui
serviront si peu et quelques copies qui seront si peu remplies (elle
seront aussi plus faciles à corriger!), mieux vaut l'utiliser pour
autre chose. Un nouveau téléphone mobile par exemple ! Au lieu
d'arpenter le rayon des fournitures scolaires des grandes surfaces,
les reporters devraient aussi enquêter dans les boutiques de
téléphonie mobile. Je suis prêt à parier qu'on y constaterait une
affluence de jeunes, flanqués ou non de leurs parents. Une anecdote
éclairante me revient en mémoire à propos de téléphone. Le
proviseur d'un lycée où j'ai exercé il y a quelques années
recevait une élève et sa mère dans son bureau. La mère, en
difficulté financière, venait demander une aide sociale. Au milieu
de l'entretien, l'élève a sorti de sa poche un téléphone mobile
rutilant orné d'une pomme croquée... A l'époque un tel téléphone
coûtait 500 euros au bas mot et même encore aujourd'hui (voire beaucoup plus!),
d'après le site du fabriquant que je viens de consulter. Même
d'occasion ou « tombé du camion », cela fait un peu
dispendieux pour une élève soit disant « dans le besoin ».
Je n'ai hélas pas su si l'aide financière avait été accordée et
encore moins à quoi elle a servi in fine. Peut-être à acheter le
forfait illimité pour le téléphone... Comme je l'ai entendu
récemment à la radio, la seule différence aujourd'hui entre les
riches et les pauvres, c'est l'argent ! Cette tautologie n'est
pas si triviale qu'elle en a l'air car en effet, riches ou pauvres,
surtout chez les jeunes, sont vêtus et équipés des mêmes marques
toutes plus tendances les unes que les autres. Il ne faudrait surtout
pas déchoir face au groupe prescripteur de mode et de comportement
sans quoi le « jeune » risque la pire relégation
sociale.
Pour en
revenir à l'allocation de rentrée scolaire, il y a sûrement des
parents qui l'utiliseront à bon escient mais nos gouvernants seraient
plus avisés de la donner sous forme de bons d'achat à valoir
uniquement sur des articles de fournitures scolaires. Quant aux
parents, ils devraient veiller à ce que ce matériel acheté aux
frais du contribuable ne soit pas abandonné dans les salles de
classe par leur chère progéniture...
(*) Ce
sont essentiellement des mères que l'on voit dans ces reportages.
Les pères n'aimeraient-ils pas faire les courses de fournitures ou
céderaient-ils facilement aux demandes de leurs enfants sur tel ou
tel produit ?
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